D’après l’ONVS, aux urgences, il y a une « hausse des faits de violence […] de 4% en 2011, 37 % concernent les coups, 34 % les injures et les insultes et 30 % les menaces »[1].

L’Ide 3, ayant 9 ans d’ancienneté dans le service, a également remarqué la forte « augmentation de tout ce qui est agressivité verbale et physique », les deux autres infirmiers n’ayant qu’à peine 2 ans d’ancienneté n’ont pas assez de recul sur le service pour pouvoir pleinement identifier cette accentuation.

Mes différentes recherches m’ont permis de remarquer qu’un nombre plus important de violences avaient lieu la nuit, comme le montre une étude menée par l’ONVS (anciennement ONVH) « les faits de soirée et de nuit conservent une place primordiale avec 35 % de violences survenant sur le créneau 18h/6h »[2].

Les trois infirmiers l’ont également constatée, « on en a plus que le jour », « ça arrive plutôt le soir », « dans la journée, il n’y a pas forcément toute cette population là ». De plus, les principaux motifs de venue la nuit sont l’angoisse et l’état d’ébriété, comme vu précédemment, on peut donc établir un lien réel entre cette population et la violence aux urgences la nuit.

D’autre part, comme cela a été expliqué dans la première partie de ce travail, le personnel soignant est plus restreint la nuit que le jour, les Ide 1 et 2 ont aussi fait ce constat évident mais ont complété leurs propos en déclarant que cela avait un réel impact sur la prise en charge de patient à risque, « [de nuit] on est une équipe plus restreinte, dès qu’il y a un agité, c’est pour ta pomme » d’après l’Ide 1, « le jour il a plus d’effectif […] les contenir c’est d’autant plus simple », précise l’Ide 2.

Selon une enquête sur la prise en charge des patients en état d’agitation dans les services  d’accueil et d’urgences en France, une majorité (38 %) de chefs de service interrogés « souhaite la présence de  3 à 4 professionnels dans ces situations »[3] de violence. Ce qu’on peut mettre en lien avec les dires des infirmiers interrogés.

Ces différents points prouvent l’impact de la prise en charge d’un patient violent ou agité sur l’organisation d’un service d’urgences mais aussi vis-à-vis des autres patients, comme le précise l’Ide 1 « ça a un impact sur la prise en charge des autres patients ».

Cette violence et cette agressivité ont un impact fort sur le personnel soignant. Dans mon cadre théorique, je m’appuie sur les émotions pour décrire le ressenti des soignants, au cours de mes entretiens j’ai interrogé les soignants sur l’impact qu’une prise en charge d’un patient à risque pouvait avoir sur eux. Leurs réponses expriment leurs émotions, leurs sentiments face à la violence des patients, « la crainte […] de se faire taper dessus », « c’est épuisant », « tu en as un peu marre », « raz le bol », « ça te touche » …

Celles-ci sont toutes des émotions négatives, cela montre que la prise en charge d’un patient violent a un impact négatif sur les soignants. Une étude sur la souffrance mentale au travail et la qualité de vie du personnel des urgences effectuée par le département de médecine de travail et d’ergonomie de la faculté de Monastir montre que «  48 % des salariés des urgences se sentaient rarement calmes et détendus »[4].

Le stress est également présent dans ces situations, comme l’explique l’Ide 3 « ça alimente le stress », la même étude qu’évoquée précédemment montre que « le stress a un impact péjoratif sur la qualité de vie des salariés des urgences ».

Des actions peuvent être mises en place face à l’agressivité des patients aux urgences. L’Ide 3 m’a expliqué, durant son entretien, qu’il existait une « formation agressivité » effectuée par l’hôpital « qui peut donner des pistes » pour gérer la violence. Cette formation est dispensée pour l’ensemble du personnel de l’hôpital. Au cours des dernières années et des derniers mois, des pistes de réflexion sont envisagées afin de diminuer ou de mieux prévenir cette violence. Selon Evelyne TERRAT, directrice de l’IFSI/IFAS de Villejuif, « les résultats du bilan présenté par l’ONVS montrent l’importance de créer un outil efficace pour faire remonter le signalement des actes de violence et adopter une politique de prévention dans chaque établissement »[6]. De plus, Marie-Françoise FORISSIER, médecin du personnel à Lyon explique que, face aux épisodes de violences, des moyens peuvent être mis en place telle que « la mise en place de formations spécifiques […] afin d’apporter des éléments de compréhension des comportements agressifs et d’anticiper les situations de violence »[7].

La comparaison entre les entretiens, mon cadre théorique et de nouvelles recherches m’ont amenée à établir une question de recherche :

En quoi la formation et la prévention de la violence aux urgences améliorent-elles la gestion des émotions des soignants lors de la prise en charge d’un patient violent, particulièrement la nuit ?

[1] TERRAT Evelyne, Les faits de violence en milieu hospitalier, L’aide soignante, Février 2013, n°144, p11

[2] FRIARD Dominique, L’observatoire national des violences hospitalières en chiffres, La revue de l’infirmière, Novembre 2010, n°165, p22

[3] BOURDINAUD V, POCHARD F, Enquête sur la prise en charge des patients en état d’agitation dans les services  d’accueil et d’urgences en France, L’encéphale, 2003, p 93

[4] MERCHAOUI I et al, Souffrance mentale au travail et qualité de vie du personnel des urgences, Archives des maladies professionnelles et de l’environnement, 2013, volume 74, N°6, p 667

[6] TERRAT Evelyne, Les faits de violence en milieu hospitalier, L’aide soignante, Février 2013, n°144, p12

[7] FORISSIER, Marie-Françoise, situations de violence à l’hôpital et prévention, Soins, Mai 2007, n°175, p36

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